La question (simplifiée et modifiée sur des éléments de détail pour éviter que l'auteur(e) ne puisse être identifié(e)) :
J'aimerais savoir quelle est la manière de dénoncer le travail dissimulé.
En effet, il y a une entreprise à coté de mon domicile qui emploie une jeune femme de façon illégale, sans titre de séjour, avec des horaires incongrus (travail jusque 23 heures voire plus).
De plus, cette personne lui fait miroiter un contrat de travail depuis plusieurs mois dans le but de régulariser sa situation sur le territoire français, sans compter que l'employé n'a aucun salaire fixe (travail au pourcentage des clients).
Ma réponse (sans garantie, n'hésitez pas à poser un commentaire si vous pensez détecter une erreur) :
Deux sujets : celui relatif au titre de séjour, et celui relatif au travail dissimulé.
Soyons clairs : l'absence de titre de séjour est un moyen qu'utilise l'employeur pour faire faire énormément de travail peu payé à une personne qui est dans une situation plus que précaire, sur tous les plans.
De nombreux travailleurs étrangers sans titre de séjour travaillent en étant déclarés et payent des impôts. Au bout d'un certain temps ils peuvent d'ailleurs déposer une demande de régularisation, en produisant notamment les fiches de paie qui prouvent l'intégration et la participation au financement de l'Etat et de la sécurité sociale.
Mais quand on est pas déclaré, il est difficile de prouver que l'on travaille depuis longtemps. Vous pouvez toujours donner à l'intéressée une attestation faisant état de la date depuis laquelle vous l'avez vu travailler. Ca pourrait lui être utile un jour que ce soit contre son employeur ou pour convaincre l'administration du fait qu'elle est là depuis un certain temps et qu'elle travaille.
Deux moyens de mettre fin à la situation :
- Dénoncer la situation à l'inspection du travail : vous pouvez le faire par courrier, de préférence non anonyme : un courrier anonyme pourrait ne pas être traité, et indiquer vos coordonnées permettrait aux agents de contrôle de prendre, si besoin, contact avec vous pour faire le point et collecter des informations qui pourraient être utiles à leur contrôle ;
- Inviter la salariée à se plaindre à l'inspection du travail ; on peux comprendre qu'il est difficile pour quelqu'un qui est sans papiers de se rendre dans un bâtiment administratif, mais il faut savoir que l'inspection du travail n'a pas pour mission de procéder ou faire procéder à l'arrestation de sans papiers (dans une préfecture ce serait différent, il y a déjà eu des arrestations au guichet ou dans un bureau). En cas de craintes, que l'on peut comprendre, elle peut toujours téléphoner et/ou écrire.
Il faut savoir que le contrôle peut avoir pour conséquence une fin du contrat de travail, puisqu'un employeur n'a pas le droit d'employer ou de conserver une personne qui n'a pas de titre de travail (et avoir un titre de séjour ne veux pas dire que l'on a un titre de travail, mais sans titre de séjour pas de titre de travail). Bien évidemment, le contrôle et la grande liberté dont dispose l'agent de contrôle de l'inspection du travail dans les suites qu'il donne à ses constats peut aussi inciter l'employeur à déposer une demande de régularisation pour le travailleur, mais c'est une fin "idéale", qui n'est pas forcément la plus fréquente, d'autant plus qu'une demande peut être acceptée comme rejettée.
Mais un sans papier exploité est à la fois auteur d'une infraction (séjour irrégulier sur le territoire) et victime d'une autre (le fait de ne pas être déclaré est souvent synonyme de non respect du SMIC et prive le salarié de tous les éléments de salaire différé : droits au chômage, à la couverture santé, à la retraite, etc.). Et en tant que victime il peut bénéficier d'une certaine protection. Il a droit notamment à des indemnités (voir articles ci-dessous), que l'inspection du travail peut l'aider à obtenir.
En cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.
Le salarié étranger a droit au titre de la période d'emploi illicite :
1° Au paiement du salaire et des accessoires de celui-ci, conformément aux dispositions légales et aux stipulations contractuelles applicables à son emploi, déduction faite des sommes antérieurement perçues au titre de la période considérée ;
2° En cas de rupture de la relation de travail, à une indemnité forfaitaire égale à un mois de salaire, à moins que l'application des règles figurant aux articles L. 1234-5, L. 1234-9, L. 1243-4 et L. 1243-8 ou des stipulations contractuelles correspondantes ne conduise à une solution plus favorable.
Le conseil de prud'hommes saisi peut ordonner par provision le versement de l'indemnité forfaitaire prévue au 2°.
Ces dispositions ne font pas obstacle au droit du salarié de demander en justice une indemnisation supplémentaire s'il est en mesure d'établir l'existence d'un préjudice non réparé au titre de ces dispositions.
N'hésitez pas à revenir plus tard nous raconter ce qui ce sera passé.