L'article complet ici.
Quelques extraits :
" Nombreux sont les cas où les entreprises doivent solliciter l'autorisation ou l'avis de l'inspecteur du travail, sans oublier la possibilité pour les salariés de former un recours contre l'avis d'aptitude ou d'inaptitude au travail émis par le médecin du travail. La réponse est généralement urgente. Or les inspections du travail, surchargées, ne parviennent pas toujours à répondre rapidement. [...]
l'allongement des délais plonge les employeurs dans des situations inextricables, comme on vient de le voir dans une affaire jugée le 3 février dernier. Il s'agissait d'une projectionniste de film, déclarée, à l'issue de deux examens médicaux en date des 6 et 21 mars 2006, « inapte à son poste actuel, apte à un poste excluant les efforts et les mouvements répétés avec le membre supérieur gauche ». Le cinéma la licencie le 20 avril suivant pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement, ignorant que la salariée a formé un recours, quinze jours plus tôt, contre l'avis médical. L'inspecteur du travail ayant infirmé cet avis par décision du 7 juin 2006, le licenciement est regardé comme privé de cause réelle et sérieuse, en dépit du fait que l'employeur n'ait eu aucun moyen de prévoir cette nouvelle donne. La salariée, estime la Cour de cassation, n'était pas tenue d'avertir l'employeur (Cass. soc. 3 février 2010). "
L'article ne répond d'ailleurs pas à la question et ne donne à l'employeur (ou au salarié) pressé d'obtenir une décision de l'inspecteur du travail aucune "astuce".... et pour cause !
Quelques éléments de comparaison et pistes de réflexion :
- Un inspecteur du travail a deux mois, à partir du moment où il est saisi, pour demander son avis au médecin inspecteur régional du travail, organiser une enquête contradictoire (employeur/salarié), et décider (après d'éventuelles recherches documentaires), aucun délai n'est fixé pour les juridictions (et en pratique ce sera bien plus de deux mois) ;
- Le délai entre la contestation et la décision qui peut infirmer la décision du médecin du travail peut en cas de contestation de la décision de l'inspecteur du travail (devant le ministre du travail ou devant le tribunal administratif) être de plusieurs mois voire plusieurs années ;
- Augmenter le nombre d'inspecteurs du travail (il y a eu une augmentation importante et récente, mais pas nécessairement suffisante) ;
- Cesser de supprimer des postes de secrétaires dans les sections d'inspection du travail, situation qui a souvent pour conséquence que des inspecteurs et contrôleurs du travail finisse par faire du travail de secrétariat et manquent donc de temps pour leurs missions premières ;
- Décharger les inspecteurs du travail de ce contentieux, mais il faut alors dire qui devient compétent (le médecin inspecteur régional du travail par exemple, au lieu de rendre un simple avis, pourrait décider seul désormais - seul problème, les médecins inspecteurs sont eux aussi débordées et le délai ne serait pas nécessairement plus court avant que les décisions soient rendues) ;
- Instituer un délai pour contester la décision du médecin du travail (un mois par exemple), mais comme de nombreux employeurs et salariés ne savent pas qu'une telle voie de recours existe, c'est ce qui explique souvent qu'elle soit exercée longtemps après la décision contestée ; On pourrait imaginer de mentionner la possibilité de contestation et le délai maximal de contestation dans l'avis du médecin du travail, mais cela alourdirait les formulaires correspondants et, surtout, augmenterait très probablement de manière importante le nombre de recours (et donc les délais de traitement....).
L'article précité présente comme "anormal" (et d'ailleurs à mon avis avec raison) le fait que l'employeur doive payer les conséquences d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse pour une période où le salarié est, "après coup", déclaré apte à son poste, alors qu'au moment où l'employeur a licencié son salarié celui-ci était officiellement inapte (et si dans le cas d'espèce le salarié avait contesté la décision du médecin du travail avant la notification de son licenciement et sans que l'employeur ne l'ai su au moment du licenciement, le salarié aurait pu théoriquement, en l'état actuel du droit, contester cette décision après la notification de son licenciement).
Mais il ne paraît pas plus juste de dire que c'est au salarié de connaître une période sans salaire et/ou l'absence d'indemnités compensant le licenciement saus cause réelle et sérieuse alors qu'il était en réalité apte à son poste et voulait travailler (puisqu'il a contesté la décision d'inaptitude).
Instaurer une responsabilité du médecin du travail ou des centres de médecine du travail est exclu : ou alors il faut instituer une responsabilité des inspecteurs du travail et des juges chaque fois qu'une de leur décision est contestée avec succès.... ce qui ne semble souhaité par personne en dehors des cas de fautes particulièrement graves.
Reste une possibilité : faire financer par la sécurité sociale cette période (au passage le mois d'attente avant reclassement ou licenciement est actuellement non indemnisé et le salarié potentiellement un mois entier sans aucun revenu, on pourrait imaginer de faire bénéficier le salarié du régime des arrêts maladie pendant cette période). Mais la solution peut paraître insuffisante pour le salarié si le revenu correspondant est inférieur à son salaire, et non justifiée puisque la solidarité nationale n'a pas à financer ce qui dépend de l'employeur.
Un conseil aux employeurs ?
Tout faire pour reclasser le salarié en cas d'inaptitude, soit en aménageant et en faisant évoluer son poste pour que le salarié puisse être déclaré apte à l'occuper (le cas échéant en invitant le salarié a demander la reconnaissance comme travailleur handicapé, ce qui ouvre des possibilités de financement et réduit la contribution correspondante si l'entreprise n'emploie pas les 6% de travailleurs handicapés imposés par la loi), soit en le reclassant sur un autre poste compatible avec les indications données par le médecin du travail.
Ainsi le salarié ne pert pas son emploi (ou un autre emploi dans la même entreprise), l'employeur ne prend aucun risque juridique, et l'inspecteur du travail peut consacrer son temps aux autres de ses missions.
En rendant dangereuse la non réussite de la recherche de reclassement, cette décision de la Cour de cassation paraît très intéressante et réellement motivante pour que des solutions soient plus souvent trouvées quand un salarié est déclaré inapte à un poste qu'il ne peut plus occuper mais peut et veut encore travailler !